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et le mit dans sa poche. Elle vit la couronne de roses flétrie et gisante sur le plancher ; puis, en la ramassant pour l’examiner, elle remarqua avec effroi que la bande de parchemin qui contenait de mystérieux encouragements n’y était plus attachée. C’était la seule preuve qu’on pût avoir contre elle de sa complicité avec une prétendue conspiration : mais à combien de commentaires pouvait donner lieu ce faible indice ! Tout en le cherchant avec anxiété, elle porta la main à sa poche et l’y trouva. Elle l’y avait mis machinalement au moment où Buddenbrok était venu la chercher une heure auparavant.

Rassurée sur ce point, et sachant bien que l’on ne trouverait rien dans ses papiers qui pût compromettre qui que ce fût, elle se hâta de rassembler les effets nécessaires à un éloignement dont elle ne se dissimulait pas la durée possible. Elle n’avait personne pour l’aider, car on avait arrêté sa servante pour l’interroger ; et, au milieu de ses costumes arrachés des armoires et jetés en désordre sur tous les meubles, elle avait, outre le trouble que lui causait sa situation, quelque peine à se reconnaître. Tout à coup le bruit d’un objet sonore, tombant au milieu de sa chambre, attira son attention ; c’était un gros clou qui traversait un mince billet.

Le style était laconique :

« Voulez-vous fuir ? Montrez-vous à la fenêtre. Dans trois minutes vous serez en sûreté. »

Le premier mouvement de Consuelo fut de courir à la fenêtre. Mais elle s’arrêta à moitié chemin ; car elle pensa que sa fuite, au cas qu’elle pût l’effectuer, serait comme l’aveu de sa culpabilité, et un tel aveu, en pareil cas, fait toujours supposer des complices. Ô princesse Amélie ! pensa-t-elle, s’il est vrai que vous m’ayez trahie, moi, je ne vous trahirai pas ! Je paierai ma dette