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la ville noire.

deux vieux faillirent s’arracher le peu de cheveux qui leur restaient, parce que l’un demandait une poignée de main que l’autre ne voulait pas accorder avant qu’on ne lui eût demandé sa bourse.

— Je sais ce que vous pensez et ce que vous débitez sur mon compte ! disait le vieux forgeron ; vous me faites passer pour un vieux cancre qui enfouit tous ses écus, et vous avez voulu subir la honte de vous laisser exproprier, quand vous saviez fort bien que je vous aurais crédité, si vous m’eussiez fait l’honneur d’une simple visite ! Mais monsieur est fier : il s’est cru plus savant que tout le monde et il a méprisé ses anciens, car je suis votre ancien, monsieur ! J’ai quatre ans de plus que vous, et tout bête et ignorant batteur de fer que je suis, vous me devez le respect. C’était à vous de venir à moi, et non pas à moi d’aller à vous ! Enfin, puisque vous voilà, il faut bien avoir pitié de votre sottise ; voilà de l’argent, monsieur, en voilà plein un tiroir. Oui, les voilà, les vieux écus de l’avare imbécile ! Prenez ce qu’il vous faut et n’ayez pas le malheur de me remercier : puisque vous n’êtes venu à moi que le