Page:Sand - La Ville noire.djvu/16

Cette page a été validée par deux contributeurs.
6
la ville noire.

sommes et le paradis qui nous invite, ça représente une vingtaine d’années de courage et d’entêtement, voilà tout ! Moi qui te parle, j’ai rêvé ça ! mais l’amour m’a pris, et les enfants sont venus. Celui qui se marie jeune et sans avances n’a plus la chance de sortir d’affaire ; mais il a la femme et les petits pour se consoler ! Voilà pourquoi, condamné à faire toujours la même chose ma vie durant, je ne me plains pas et prends le temps comme il vient.

— C’est ce qui te prouve, dit Sept-Épées, qu’il y a deux partis à prendre : ou rester pauvre avec le cœur content, ou se rendre malheureux pour devenir riche. Eh bien ! je suis entre ces deux idées-là, moi, et ne sais à laquelle me donner. Voilà pourquoi je suis, non pas triste comme tu le penses, mais soucieux et changeant de projets tous les jours sans pouvoir en trouver un qui ne me fasse pas trop de peur.

— Je vois que tu es de ceux qui retournent trop leur plat sur le feu et qui le laissent brûler. Tu regardes le mauvais côté des choses, et tu es toujours dans l’envers de ton étoffe. À quoi te servira ton es-