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la petite fadette

tant seulement pour me regarder et pour embrasser le bout de mon rideau. Mon Landry est bien un véritable garçon. Ça ne demande qu’à vivre, à remuer, à travailler et à changer de place. Mais celui-ci a le cœur d’une fille ; c’est si tendre et si doux qu’on ne peut pas s’empêcher d’aimer ça comme ses yeux.

Ainsi devisait en elle-même la mère Barbeau tout en retournant à son lit, où elle ne se rendormit point, tandis que le père Barbeau emmenait Landry à travers prés et pacages du côté de la Priche. Quand ils furent sur une petite hauteur, d’où l’on ne voit plus les bâtiments de la Cosse aussitôt qu’on se met à la descendre, Landry s’arrêta et se retourna. Le cœur lui enfla, et il s’assit sur la fougère, ne pouvant faire un pas de plus. Son père fit mine de ne point s’en apercevoir et de continuer à marcher. Au bout d’un petit moment, il l’appela bien doucement en lui disant :

— Voilà qu’il fait jour, mon Landry ; dégageons-nous, si nous voulons arriver avant le soleil levé.

Landry se releva, et comme il s’était juré de ne point pleurer devant son père, il rentra ses