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esprit et son talent naturel avaient surpassé l’enseignement de sa grand’mère. Elle ne voulait faire mystère de rien à Landry, et, comme il avait toujours un peu peur de la sorcellerie, elle mit tous ses soins à lui faire comprendre que le diable n’était pour rien dans les secrets de son savoir.

— Va, Landry, lui dit-elle un jour, tu n’as que faire de l’intervention du mauvais esprit. Il n’y a qu’un esprit et il est bon, car c’est celui de Dieu. Lucifer est de l’invention de monsieur le Curé, et Georgeon, de l’invention des vieilles commères de campagne. Quand j’étais toute petite, j’y croyais, et j’avais peur des maléfices de ma grand’mère. Mais elle se moquait de moi, car l’on a bien raison de dire que si quelqu’un doute de tout, c’est celui qui fait tout croire aux autres, et que personne ne croit moins à Satan que les sorciers qui feignent de l’invoquer à tout propos. Ils savent bien qu’ils ne l’ont jamais vu et qu’ils n’ont jamais reçu de lui aucune assistance. Ceux qui ont été assez simples pour y croire et pour l’appeler n’ont jamais pu le faire venir, à preuve le meunier de la Passe-aux-Chiens, qui, comme ma grand’-