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la petite fadette

avoir ce bonheur-là. Mais, au moment où il allait appeler Sylvinet, qui ne le voyait pas encore, et ne faisait pas mine de l’entendre, à cause du bruit de l’eau qui grouillait fort sur les cailloux en cet endroit, il s’arrêta à le regarder ; car il était étonné de le trouver comme la petite Fadette le lui avait prédit, tout au milieu des arbres que le vent tourmentait furieusement, et ne bougeant non plus qu’une pierre.

Chacun sait pourtant qu’il y a danger à rester au bord de notre rivière quand le grand vent se lève. Toutes les rives sont minées en dessous, et il n’est point d’orage qui, dans la quantité, ne déracine quelques-uns de ces vergnes qui sont toujours courts en racines, à moins qu’ils ne soient très gros et très vieux, et qui vous tomberaient fort bien sur le corps sans vous avertir. Mais Sylvinet, qui n’était pourtant ni plus simple ni plus fou qu’un autre, ne paraissait pas tenir compte du danger. Il n’y pensait pas plus que s’il se fût trouvé à l’abri dans une bonne grange. Fatigué de courir tout le jour et de vaguer à l’aventure, si, par bonheur, il ne s’était pas noyé