Page:Sand - La Petite Fadette, Calmann-Lévy.djvu/101

Cette page a été validée par deux contributeurs.
77
la petite fadette

son sauteriot, qui avait réussi à la rattraper et à se pendre à son mauvais jupon tout cendroux, se mit à suivre Landry, toujours ricanant et toujours lui disant que sans elle il ne retrouverait jamais son besson. Si bien que Landry, ne pouvant se débarrasser d’elle, et s’imaginant que, par quelque sorcellerie, sa grand’mère ou peut-être elle-même, par quelque accointance avec le follet de la rivière, l’empêcheraient de retrouver Sylvinet, prit son parti de tirer en sus de la Joncière et de s’en revenir à la maison.

La petite Fadette le suivit jusqu’au sautoir du pré, et là, quand il l’eut descendu, elle se percha comme une pie sur la barre, et lui cria :

— Adieu donc, le beau besson sans cœur, qui laisse son frère derrière lui. Tu auras beau l’attendre pour souper, tu ne le verras pas d’aujourd’hui ni de demain non plus ; car là où il est, il ne bouge non plus qu’une pauvre pierre, et voilà l’orage qui vient. Il y aura des arbres dans la rivière encore cette nuit, et la rivière emportera Sylvinet si loin, si loin, que jamais plus tu ne le retrouveras.