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vite, ce serait signe de stérilité, et tu serais là-haut sur sa maison comme un mauvais présage. »

La journée est déjà avancée quand toutes ces choses sont accomplies. Il ne reste plus qu’à faire la conduite aux parrains et marraines des conjoints. Quand ces parents putatifs demeurent au loin, on les accompagne avec la musique et toute la noce jusqu’aux limites de la paroisse. Là, on danse encore sur le chemin et on les embrasse en se séparant d’eux. Le païen et sa femme sont alors débarbouillés et rhabillés proprement, quand la fatigue de leur rôle ne les a pas forcés à aller faire un somme.

On dansait, on chantait et on mangeait encore à la métairie du Belair, ce troisième jour de noce, à minuit, lors du mariage de Germain. Les anciens, attablés, ne pouvaient s’en aller, et pour cause. Ils ne retrouvèrent leurs jambes et leurs esprits que le lendemain au petit jour. Alors, tandis que ceux-là regagnaient leurs demeures, silencieux et trébuchants, Germain, fier et dispos, sortit pour aller lier ses bœufs, laissant sommeiller sa jeune compagne jusqu’au lever du soleil. L’alouette, qui chantait en montant vers les cieux, lui semblait être la voix de son cœur rendant grâce à la Providence. Le givre, qui brillait aux buissons décharnés, lui semblait la blancheur des fleurs d’avril précédant l’apparition des feuilles. Tout était riant et serein pour lui dans la nature. Le petit Pierre