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LA FAMILLE DE GERMANDRE.

d’épanouissement, quels sauvages parfums, quelle liberté d’allures, quelles grâces imprévues dans la flore d’un petit coin de terre respecté ou épargné par hasard ! Et comme toute la terre serait belle et fleurie, ô mon Dieu, si l’homme et les troupeaux n’existaient pas ! Les fleurs paresseuses, les petits oiseaux fureteurs et les insectes diligents feraient encore assez bon ménage, puisqu’on transportant sur leurs ailes et sur leurs pattes la poussière des étamines, les mouches et les oiselets sont de grands agents de fécondation et sèment autant qu’ils récoltent. Mais la chèvre impitoyable et fantasque qui veut goûter à tout, mais l’âne qui ne fait pas grâce aux chardons les mieux pourvus d’épines, mais le bœuf pesant dont chaque pas écrase un monde de plantes et d’insectes !… Il faut pourtant qu’ils vivent. Eux aussi sont beaux et bons. L’âne est sage et plein de raisonnements. Mais cette insolente graminée qui envahit tout, ce triomphant triticum, produit mystérieux, qui, sous le nom pompeux de froment, renie tous ses humbles ancêtres et va chassant devant lui toutes ses sœurs plébéiennes, les plantes inutiles à