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qu’il me semblait plus logique de ne prendre que dans la campagne on m’expliqua qu’au bas de la galerie souterraine qui descend sous l’allée de cyprès, il y avait de l’eau, en ce moment, jusqu’à mi-jambes.

— Quand nous serons là, je vous prendrai en croupe sur mon bidet, dit Felipone ; il est de force à porter double charge.

— Vous oubliez, lui dis-je, que je ne pars pas, moi !

— Vous ne partez pas ? répéta le docteur.

— Vous ne partez pas ? s’écria le prince.

— Non, reprit Felipone, et il a raison. Je me charge de lui jusqu’à nouvel ordre ; mais il ne refuse pas de vous accompagner avec moi un bon bout de chemin, car les amis sont les amis, et, s’il y a quelque groupe de carabiniers en travers de votre fuite, il est bon d’être en force.

— Non, non ! dit le prince. Pourquoi l’exposer à des dangers ?…Je ne veux pas !

Je le priai de ne pas formuler un refus blessant pour moi. Je sentais bien que l’honneur me déliait de mon serment envers Daniella. L’amour ne peut pas prescrire une lâcheté. Je m’expliquai si nettement sur le plaisir que j’éprouvais à faire mon devoir en cette circonstance, que le prince céda, en me serrant cordialement la main.

— Je vous verrai avec regret revenir ici, me dit-il. La situation n’est pas bonne pour vous. Tant que nous y sommes, mon frère le cardinal maintient sa défense de laisser pénétrer dans le château ; mais dès qu’il nous saura partis, il se fera volontiers arracher la permission de faire ouvrir les portes. On s’emparera de vous, et il entrera fort bien dans les idées de mon frère de vous sacrifier. Vous pourrez bien alors expier, par une captivité plus dure que celle de Mondragone, la hasard qui nous y rassemble.

— Ne craignez rien, Excellence, dit Felipone ; je le logerai