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vant dormir et en proie à un état fébrile qui m’inquiétait, me dit tout à coup :

— Lève-toi, ami ! Il faut pénétrer dans cette befana maudite. Qui sait s’il a eu le courage de tuer sa femme ? Elle n’est peut-être en punition que pour un temps…

— Je n’espère plus rien ; mais, pour te calmer, me voilà prêt à essayer l’impossible. Que crois-tu que je doive faire ? Lorsque j’ai cherché, avec Benvenuto, le chemin de cette befana, j’en ai approché beaucoup, puisque le docteur m’a dit avoir entendu notre travail et en avoir été inquiet.

— Ce travail était dangereux, je ne veux pas que tu le reprennes ; mais, moi, je crois, je dis qu’il y a une autre entrée à la befana que celle que nous connaissons, une entrée que Felipone a découverte depuis le temps que le prince et le docteur y étaient, et dont il se réserve le secret pour lui seul.

— Qui te donne cette pensée-là ?

— Une espèce de vision que je viens d’avoir. Oh ! ne me regarde pas d’un air inquiet, ne me crois pas en délire. Je dis une vision, ce n’est pas autre chose qu’un souvenir ; mais un souvenir qui s’était effacé tout à fait et qui vient de me revenir, comme j’étais là, moitié pensant, moitié rêvant. Écoute ! Le jour où Felipone nous donna l’idée de nous marier en dépit du curé, je l’avais rencontré dans la partie tout abandonnée du parc qui est entre l’allée des cyprès et le mur de clôture. Il creusait une espèce de fossé, et, comme ce n’est pas là son ouvrage, je m’en étonnai. Il ne me donna pas une bonne raison ; mais je n’y fis que peu d’attention, et tant de choses intéressantes m’ont occupée ce jour-là et le lendemain, que je n’ai pas gardé souvenir d’une chose si indifférente. Voilà qu’elle me revient et c’est peut-être Dieu qui veut que je m’en souvienne. Allons-y.

— Reste tranquille, j’irai seul. Dis-moi où cela est.