Page:Sand - La Daniella 2.djvu/285

Cette page n’a pas encore été corrigée

de cette sotte liaison avec la Vincenza. Avec un peu de raison et de justice, elle aurait pu se dire que je n’aimais qu’elle, et que, si j’avais subi la fermière jusqu’au dernier moment, c’était bien faute de savoir comment me débarrasser d’elle sans esclandre. Mais une femme orgueilleuse comme Medora ne peut pardonner ce qui semble un outrage à sa beauté et à sa puissance. C’était la seconde fois qu’elle se trouvait en rivalité avec une de ces femmes qu’elle considère comme appartenant à une race inférieure à la sienne. Elle ne pouvait avaler cela. J’ai payé pour deux ! Quant au prince, il a fait ce que j’eusse fait sans scrupule à sa place, et je pense vous avoir prouvé hier que, si je ne lui cherche pas querelle, ce n’est pas par poltronnerie. Il me semble qu’une provocation ferait croire à Medora que je suis inconsolable. Or, il n’en est point ainsi. Ma colère se passe, et ma consolation se trouvera.

Le personnage à qui Brumières rendit encore plus de justice fut Felipone. Il nous raconta avec émotion, et avec plus de couleur que je n’en puis mettre dans ce récit, ce qui s’était passé entre lui et le fermier.

— Cet Italien ventru est un homme, nous dit-il, un homme de rare énergie que j’aurais bien voulu étrangler, cette nuit, à cause de sa force physique, mais dont, malgré tout, j’étais obligé d’admirer la force morale. Je ne sais pas si c’est lui qui a eu l’idée de m’attirer dans ce piége, mais j’y ai donné complètement. C’est la Vincenza, perfide ou résignée, qui est venue me dire, à Piccolomini, que Medora me demandait. Celle-ci était montée dans sa chambre à huit heures, après avoir reçu et agréé mon bijou étrusque au jardin. Moi, j’avais couru si vite sur les chemins à pic de Tusculum, que je n’en pouvais plus. Devant me lever avant le jour, je m’étais jeté sur mon lit. N’importe, je me