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J’étais sur le point de rire aussi ; mais, revenant à moi, je courus à Felipone et lui saisis brusquement le bras en lui disant :

— Felipone ! où est M. Brumières ?

— Il n’est pas là, répondit-il en se dégageant avec la force d’un taureau, mais sans montrer ni peur ni colère.

— Réponds ! dis-je à Tartaglia ; qu’avez-vous fait de lui ?

— Bien autre chose qu’un célibataire jusqu’à nouvel ordre, mossiou. Soyez tranquille ! Tartaglia est homme d’honneur, à présent, et ne laisse faire de mal à personne. Vous retrouverez votre ami, sans une seule égratignure, dans la niche que l’on m’a appris à connaître, et d’où je sais, par expérience, qu’il est impossible de descendre sans échelle, à moins de vouloir se casser en plusieurs morceaux sur le pavé.

— Et qui a fait ce beau tour-là ?

— Moi, mossiou ! C’est une idée de moi, et faites-m’en compliment, ajouta-t-il en m’emmenant à l’écart pendant que Felipone se perdait dans la foule : le fermier voulait le tuer. Oh ! Daniella avait vu clair ! Mais j’ai fait comprendre à ce jaloux qu’un homme mort est plus tranquille qu’un homme vivant, et qu’il serait bien plus vengé en faisant manquer ce mariage qui était le but de l’ambition de son ennemi. Il s’est donc chargé de l’attirer à la gueule du souterrain, sous prétexte que Medora, qui était, en effet, à la ferme avec le prince, le demandait. Alors, il l’a bâillonné adroitement sans lui faire de mal, et comme il est fort (vous savez, c’est un bœuf !), il l’a porté à la befana et incrusté dans la niche, avec l’aide d’Orlando, le cuisinier du prince.

Pendant ce temps-là, le prince, que Medora (je dois dire à présent la princesse) ne s’attendait pas à trouver à la ferme avec moi, rendait lui-même les lettres, se soumettait,