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l’exploration de tous les côtés du château, par où une descente, au moyen de la corde à nœuds, nous eût été tant soit peu possible. Tout était gardé. Nous comptâmes cinquante hommes autour de notre citadelle. C’était plus qu’il n’en fallait pour nous bloquer. La grille de l’esplanade, dont, au reste, nous n’avions pas les clefs (cela est du domaine de Felipone), et qui se trouve très-voisine des portes du parterre et de la grande cour, était gardée aussi ; précaution assez inutile, puisque nous ne pouvions pas aller sur l’esplanade dite le terrazzone.

— Ah ! mossiou ! s’écria Tartaglia en rentrant de nouveau dans le casino avec moi, nous sommes pris ! Il est évident que l’on respectera notre asile, en prenant à la lettre la défense du cardinal de franchir les portes du château ; car il n’est pas besoin de cinquante hommes pour faire sauter les gonds ou pour mettre le feu aux battants ; mais on nous fera dessécher ici tout doucement, ou bien on tirera sur nous au premier mouvement que nous ferons pour sortir. N’avancez pas comme ça la tête au-dessus des balustres, mossiou ! ils sont capables de vous envoyer des balles, sous prétexte que vous avez la tête estra-muros.

Le pauvre Tartaglia était démoralisé ; d’autant plus que, pendant notre ronde, le capucin, pour se remettre de son épouvante, avait avalé les restes copieux de mon souper.

Ogni santi ! (Par tous les saints !) s’écria Tartaglia en lui arrachant le plat des mains, nous avons là un joli convive ! J’ai beau être un cuisinier de génie et un homme de ressources, que ferons-nous, mossiou, de ce capucin qui mange comme six, de cet estomac d’autriche (Tartaglia voulait sans doute dire autruche), de cette sangsue qui sera capable de nous sucer vivants pendant notre sommeil ? Va-t’en au diable, capucino ! ajouta-t-il en italien, je ne me charge pas de toi. Tu t’arrangeras pour faire cuire à ton