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nir. Je commence bien, puisque j’ai donné au prince le bon conseil de rendre les lettres, ce qui est une chose noble et faite pour attendrir la Medora : qu’en pensez-vous ? Mais vous êtes préoccupé, et peut-être que mon bavardage vous ennuie ?

Nullement ; mais je vois que ma femme veut te parler, et qu’elle me fait signe d’aller dans la cuisine.

En effet, Daniella avait eu l’inspiration de confier à Tartaglia le danger où elle croyait Brumières si Felipone nous quittait avant deux heures, et il abrégea toute explication en lui disant :

— Ah ! ah ! je sais ! la Vincenza ! Il est enfin jaloux !

Il se chargea de retenir Felipone, bien qu’il ne fît pas des souhaits bien ardents pour la conservation des jours de Brumières. Il savait, par le fermier, chez qui il était arrivé le matin même, que Brumières était devenu le cavalier servant de Medora ; mais il ne s’en inquiétait pas beaucoup. Il pensait qu’elle se moquait de lui. Daniella se garda bien de trahir le secret de Brumières. Nous en étions, elle et moi, les seuls confidents. Les témoins, avertis à Rocca-di-Papa, ne savaient pas eux-mêmes pour quel office ils étaient requis et à moitié payés d’avance.

Pendant cette explication, j’aidais Felipone à désembrocher son lièvre, et chaque instant qui s’écoulait me donnait la conviction qu’il ne songeait qu’à manger, à rire et à babiller.

Quand nous eûmes apaisé la première faim. Tartaglia reprit devant le fermier le thème favori de ses projets de fortune, et celui-ci me parut très au courant de ses espérances relativement à la réconciliation du prince avec la belle Anglaise. Il me sembla même comprendre, à quelques monosyllabes échangés entre eux, que le prince était attendu à son ancienne résidence de la befana d’un jour à l’autre.