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LV


Daniella était enchantée de revoir Tartaglia et de le savoir heureux.

— Puisque tu veux mettre le couvert à ma place, lui dit-elle, tu vas au moins souper avec nous.

Mais à peine eut-elle fait cette invitation, qu’elle se tourna vers moi, comme pour me demander pardon d’avoir oublié mes anciennes méfiances et mon peu de goût pour la société de ce singulier personnage.

Mais les événements m’avaient prouvé de reste que Tartaglia était loyal en amitié, et j’étais trop son obligé pour hésiter à l’admettre sur le pied d’égalité où ma femme avait toujours été avec lui. Je confirmai l’invitation ce dont il parut extrêmement flatté.

— Vous êtes bon comme un homme d’esprit, me dit-il ; vous avez raison, mossiou, de tendre la main à Tartaglia pour l’élever à vous. Tartaglia n’est pas un mauvais homme, vous le savez bien ; mais, entre nous soit dit, c’était quelquefois une vraie canaille. Que voulez-vous ! la jeunesse, les passions, la misère, un peu de vin par-ci, un peu de paresse par-là, et aussi le libertinage ! Mais Tartaglia est devenu vieux, et, un beau jour, il s’est dit qu’il fallait faire une bonne fin. L’occasion l’a servi, c’est-à-dire que le ciel l’a aidé. Écoutez son aventure :

« En se sauvant des griffes de la police, qu’il avait trahie par dévouement à l’amitié, il s’est trouvé dans une petite bourgade de la maremme siennoise, où une méchante chaloupe pontée venait de déposer un plus illustre fugitif, notre cher