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— Ça n’est pas la peine, répondit-il ; je l’entends qui met le couvert. Il est là.

En effet, un bruit d’assiettes se faisait entendre dans la petite salle à manger. J’y entrai. Un domestique, en habit noir tout neuf et en manchettes d’un blanc irréprochable, avait la figure tournée vers le buffet ; mais sa petite taille et sa tournure hasardée étaient trop remarquables pour que je pusse hésiter à le reconnaître.

— Tartaglia ! m’écriai-je en courant à lui.

— Non plus Tartaglia, mossiou, me dit-il en me saluant avec une grâce bouffonne, mais Benvenuto, comme on me nomme dans les autres pays. Benvenuto, premier valet de chambre, homme de confiance, et, sous peu, intendant de la maison de Son Altesse le prince de Monte-Corona, à Gênes !

— Quoi ! tu es entré au service de ce bon prince ? Où est-il ? comment va-t-il ?

— Il se porte bien, et il réside à Gènes, comme je vous le dis.

— Mais toi ? comment te trouves-tu ici ?

— Il m’a chargé d’une mission de confiance (il baissa la voix). Je reviens incognito rapporter à la belle Medora des lettres compromettantes ; le prince est grand et généreux.

— C’est bien ; mais, dans le peu de temps qui s’est écoulé depuis le jour où tu m’as servi de témoin, tu n’as pas eu le temps d’aller à Gênes et d’en revenir ?

— Je l’aurais eu, mais je n’ai pas fait un si long voyage. Le prince était encore à la frontière des États romains quand il m’a donné son amitié, ma place auprès de lui, et la commission dont je m’acquitte.