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qu’il me mettait dans une situation délicate : il me fallait, ou abuser de sa confiance, ou tromper lord et lady B*** dans le cas où, ayant quelque soupçon, ils me questionneraient. Je résolus de ne pas les voir ce jour-là et de rentrer tard à Mondragone, pour le cas où milord viendrait m’y rendre visite dans l’après-midi.

— Puisque vous retournez par ce côté-ci de Tusculum, dit Brumières (et cela me paraît en effet le plus cour), je vais avec vous.

Il fut convenu qu’il nous laisserait chez Onofrio ; mais, quand nous entrâmes chez le berger, la curiosité de voir le petit musée qu’il s’est fait dans son paillis le retint. Brumières est flâneur, comme le sont les caractères enjoués et communicatifs.

Nous étions là depuis un quart d’heure lorsque je m’entendis appeler du dehors. Je sortis, croyant reconnaître la voix de Felipone. C’était lui, en effet, armé de son fusil, suivi de deux chiens de chasse et portant quelques perdrix dans sa gibecière.

— Avec qui êtes-vous là-dedans ? me demanda-t-il en me montrant la cabane.

— Avec ma femme et Brumières. Pourquoi n’entrez-vous pas ?

— Je vais entrer. Je n’étais pas sûr que ce ne fût pas un étranger, et, vous savez, on est sot, on est timide !

— Vous, timide ?

— Mais oui, avec les gens que je ne connais pas.

— Eh bien, vous connaissez Brumières, venez !

— Oh ! certainement, je le connais : un bon enfant, un charmant garçon !

Je le regardai pour voir s’il n’y avait pas d’amertume dans