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large poitrine. Quant à l’autre, ça ne sera pas bien facile à trouver si vite : il y a peu de gens disposés à se mettre mal avec le curé. N’importe, on avisera, et on se lèvera de bon matin. Tenez chez moi par le souterrain, à six heures précises. Et bonsoir, car je veux être sur pied avant le jour.

— Et pourquoi n’irais-tu pas tout de suite à Frascati ? lui dit Daniella. Il n’est pas tard, tu trouverais les gens chez eux.

— Non pas ! reprit-il ; quand on demande aux gens un service un peu délicat, il ne faut pas leur laisser une nuit de réflexion.

Il s’éloigna, et Daniella, se jetant dans mes bras, me supplia de réfléchir aussi, moi, à la détermination que je venais de prendre. Elle s’effrayait du silence de mon oncle et craignait de m’attirer des chagrins.

— Attendons encore quelques jours, disait-elle ; peut-être recevras-tu une bonne réponse qui nous mettra l’âme en joie et en repos pour ce beau jour de notre mariage.

— Ayons l’âme en repos et en joie tout de suite, lui répondis-je. Si j’ai quelque chagrin de famille, il ne sera pas à comparer à ce que tu as souffert pour moi. Mon oncle n’a aucune espèce de pouvoir légal pour s’opposer à mon mariage. Sa volonté, si elle était contraire à ma résolution, aurait beaucoup d’empire sur moi en toute autre circonstance ; mais celle-ci est au-dessus de toute considération. Songe donc, Daniella, tu portes déjà là, contre ton cœur, un être que j’aime déjà avec passion. Je peux déjà dire : C’est vous deux que j’aime plus que tout au monde ! À qui me dois-je, je te le demande ? Pourquoi attendrais-je des discussions qui ne peuvent rien changer entre nous, et dont l’issue sera toujours la même ? L’autre nuit j’ai rêvé que j’entendais une voix d’ange à mon oreille. C’était ; celle de mon enfant