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— Et pourquoi n’aurait-elle pas été sincère ? Si les coquettes recevaient de temps en temps une leçon bien polie, bien discrète, mais bien nette…

— Elles se corrigeraient peut-être, je ne sais pas ! mais je sais que Medora a inventé quelque chose de perfide. Elle m’a offert de l’argent.

— Pour payer ton silence ?

— Voilà ce que je lui ai dit en refusant. J’étais offensée de ses doutes ; je lui avais tendu la main, je lui avais dit : « Ne craignez rien ; tout cela restera entre nous.» Elle devait me croire. Elle a juré alors qu’elle me croyait, qu’elle m’estimait, et elle a prétendu que je n’avais pas le droit de refuser ce qu’elle appelait une petite dot, vingt mille francs ! « Je sais par M. Brumières, m’a-t-elle dit, que M. Valreg possède cela, ni plus ni moins. Je veux que tu sois son égale sous le rapport de la fortune. C’est une preuve de véritable amitié que je te donne, et, si tu ne comprends pas cela, c’est que tu n’aimes pas M. Valreg, qui va être bien pauvre et forcé de se faire ouvrier peut-être, quand il aura femme et enfants.» Enfin, elle m’en a tant dit, et l’idée de te réduire à la misère me faisait tant de mal, que j’ai accepté, et, pendant trois jours, j’ai eu ces vingt mille francs en bank-notes dans la poche de mon tablier.

— Et tu ne les as plus, j’espère ?

— Non, je les ai rendus ce soir. Je n’ai gardé que le joli petit portefeuille de satin blanc, comme souvenir ; et le voilà ! Tiens, regarde, qu’il est bien vide !

J’embrassai encore ma chère Daniella en la bénissant d’avoir repoussé cette tentation.

— C’est moi qui te remercie, reprit-elle, de m’avoir fait sentir ce que je dois être en devenant ta femme. J’étais pourtant bien contente d’avoir ces vingt mille francs ! Je les comptais trois ou quatre fois par jour dans le pianto, quand