Page:Sand - La Daniella 2.djvu/211

Cette page n’a pas encore été corrigée

cela. C’est comme cela que j’ai toujours aimé les chansons et la danse, et, quand je disais à mes compagnes : « Je n’aime pas le bal, mais j’y vas pour danser :» elles comprenaient bien que je n’y allais pas pour les amoureux et pour les compliments, mais pour le besoin de me décoller l’esprit et les pieds de la terre où l’on marche.

— Il faut que je t’embrasse pour cette métaphore, mon bel oiseau du ciel. Tu la sentiras encore plus claire et plus vraie à mesure que tu découvriras, dans l’art, des sources d’émotion, de recueillement et d’enthousiasme que tu ne fais encore que deviner.

— Donc, il faut que je travaille et que je ne me tourmente pas de ce qui en arrivera ? Pourtant… Est-ce que tu as beaucoup de talent, toi ?

— Je ne pense pas, mais je tâche d’en avoir.

— Et tu crois que tu en auras ?

— Oui, j’espère : espérer, c’est croire.

— Mais ce sera long ?

— Peut-être que non.

— Et cela te fera riche ?

— Cela est douteux. Je ne sais pas. Tu as donc besoin d’être riche ?

— Moi ? Pourquoi aurais-je ce besoin-là ? J’ai toujours été pauvre : mais, tu es riche, toi !

— Tu trouves ?

— Oui, par comparaison, et je pense toujours que tu vas manger ce que tu as pour me faire belle et paresseuse.

— Travaille donc et ne crains rien. Disons-nous, pour n’avoir pas de déception, qu’à nous deux nous gagnerons toujours le nécessaire, et que nous pouvons nous passer du superflu.