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étiez la cause involontaire de son revirement. Peut-être que vous lui faites un nouveau tort de cette trahison subite envers le prince : moi aussi, je pense que, le vin étant tiré, il fallait le boire ; mais, quelle que soit votre opinion sur sa conduite, je vous dois un éclaircissement sur votre situation. En votre faveur, lady B*** abjurera tous ses préjugés ; elle vous l’a dit et cela est certain. Donc, vous pouvez obtenir la main de sa nièce sans lui déplaire, non plus qu’à moi, qui n’ai aucune espèce de préjugé sur la différence des conditions sociales et qui vous trouve, tel que vous êtes au moral, infiniment au-dessus de miss Medora.

Vous pensez bien que je n’hésitai pas à déclarer à lord B*** que j’avais une seule, mais invincible raison, pour ne pas vouloir plaire à sa nièce.

— Et cette raison, lui dis-je, c’est que je ne l’aime pas.

— C’est une raison, dit-il, et je ne vous prêcherai pas, comme autrefois, la raison contraire. J’ai passé vingt ans à maudire les mariages d’inclination, et, à présent, je vois que l’amour dans le mariage est l’idéal de la vie humaine. Quand on le manque ou quand on le laisse envoler après l’avoir saisi, c’est qu’on ne méritait pas de le conserver.

Le médecin se releva à cinq heures du matin et jugea la malade hors de danger quant à cette fièvre ataxique, dont le dernier accès venait d’être paralysé par ses soins. Seulement il lui trouva la respiration progressivement embarrassée. Dans la journée, une pleurésie se déclara. C’était une maladie nouvelle qui devait suivre son cours, et qu’il promit de venir observer et soigner tous les jours durant quelques heures. Un autre médecin, dirigé par ses conseils, vint s’installer à Piccolomini pour suivre et combattre, heure par heure, les symptômes du mal. Toute une pharmacie de prévision fut envoyée de Rome le jour même.

Nous pûmes tous prendre un peu de repos, même lord