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jeune fille sage. — N’importe, a-t-elle répondu, vous ne me diriez pas la vérité. Elle me la dira, à moi, car j’ai de l’empire sur elle ; et si elle a cette faute sur la conscience, je lui ferai une bonne morale pour qu’elle n’en ait jamais d’autres à se reprocher, et pour qu’elle devienne digne de l’amour de M. Valreg.

— Or, mon ami, continua lord B***, si cette jeune fille n’a jamais commis de péché qu’avec moi, je vous jure…

— Je le sais ; je suis tranquille, puisque j’en fais ma femme.

— Votre femme ! Avez-vous bien réfléchi à cela ?

— J’ai fait mieux que de réfléchir : j’ai laissé mon âme ouverte à la foi.

— Mais la différence d’éducation, l’entourage, les antécédents de position sociale, votre famille, à vous !

— Je n’ai pensé à rien de tout cela.

— C’est ce que je vous reproche. Il faudrait y penser.

— Non ! J’ai mieux à faire, c’est d’aimer et de vivre !

Il soupira et garda le silence comme pour chercher des arguments nouveaux ; mais il était si absorbé par sa propre situation qu’il n’en trouva pas. Il fut même étonné quand je le remerciai de ce qu’il avait fait pour moi. Il l’avait presque oublié.

— Ah ! oui, dit-il en passant sa main sur son front chauve et flétri : vous m’avez donné beaucoup d’inquiétude. Je n’en avais pas absolument alors pour milady ; mais, depuis deux jours, j’ai vécu un siècle. Voyons, dites-moi donc vos aventures.

Je les lui racontai succinctement, dans l’espoir de le distraire, mais je vis bien que, s’il faisait l’effort de m’écouter, il ne pouvait pas faire celui de m’entendre ; et, avant que j’eusse fini :