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francs en poche pour fréter un petit bâtiment de contrebande qui viendra vous attendre, à ses risques et périls, à Torre di Paterno ou à Torre di Vajanica ?

— Hélas ! non. J’oublie que je ne suis pas un prince et que je n’enlève pas une héritière. Il me faudrait passer par le chemin de tout le monde, et ce serait plus long et plus difficile. Donc, faites-moi rentrer dans ma cage la nuit prochaine. Partez ! courez délivrer Daniella ! Je saurai bien me cacher tout seul ! D’ailleurs, à quoi servent nos précautions ? Puis-je compter sur autre chose que sur la Providence, dans le position où me voici ? Ne vais-je pas rencontrer, dans la cachette où vous voulez me conduire, quelques-uns des bandits que nous avons étrillés et qui, fuyant comme nous les carabiniers, s’y seront rendus ou s’y rendront de leur côté ?

— Je ne serais pas si novice que de vous exposer à refaire connaissance avec leurs pierres. Soyez tranquille ! la bande qui accompagnait nos deux coquins n’est pas de ce pays-ci. Les gens de Frascati ne sont pas si mauvais que ça, ni si hardis non plus ; ils connaissaient trop bien Masolino pour s’entendre avec lui. Nos assassins sont d’ailleurs ; et je gagerais que ce sont tous gens de Marino, le bourg du Diable ! À l’heure qu’il est, ils rentrent chez eux par le bois Ferentino ; ils se déshabillent et se couchent comme feraient des chrétiens, et, si l’on fait par là des perquisitions, leurs femmes crieront Jésus-Dieu et jureront sur le sang du Christ qu’ils n’ont pas découché. D’ailleurs, voyez-vous, ma cachette est une cachette. Elle n’est connue que d’Onofrio qui l’a découverte, de moi, du docteur et de ma femme. La chère âme y a nourri notre ami pendant vingt-quatre heures, avant que l’entrée de mon souterrain fût tout à fait déblayée. Venez donc, et sachez d’ailleurs que c’est mon chemin, car je ne veux pas risquer d’être vu revenant par