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— Tu as raison, me cria-t-elle en me jetant ses bras autour du cou. Il vaut mieux être sincère. Eh bien, oui, je suis une folle, et mes sens me gouvernent !

— À la bonne heure ! J’en remercie ma bonne destinée. Donc, je ne suis pas ton premier amour ?

— Non, non ! je mentais ! Ne te reproche rien, et aime-moi comme je suis, comme tu peux, n’importe comment ! Mais silence ! Éteins cette bougie, j’entends la Mariuccia qui rentre. Elle va venir voir si tu es rentré aussi ; fais semblant d’être endormi ; ne bouge pas ; si elle parle, ne réponds pas.

Quand le jour parut, je n’étais plus dans les bras de Daniella, j’étais à ses pieds. Ah ! mon ami, je pleurais comme un enfant, et ce n’était plus de dépit, ce n’était plus de crispation nerveuse, c’étaient des larmes du fond de mon cœur, des larmes de reconnaissance et de repentir surtout. Chère et charmante jeune fille ! Elle m’avait trompé ; elle avait voulu être à moi à tout prix, méconnue, calomniée, avilie par ma méfiance, par ma passion égoïste et brutale. Et j’étais châtié comme j’avais craint de l’être : une fille pure avait assouvi ma soif de voluptés, et j’avais été le possesseur inepte et indigne d’un trésor d’amour et de candeur !

— Oh ! pardonne-moi, pardonne-moi ! lui disais-je. Je t’ai désirée comme on désire une chose de peu prix ; j’ai rougi en moi-même du sentiment qui me poussait vers toi ; je l’ai combattu, je l’ai souillé tant que j’ai pu dans ma pensée. J’ai fait comme les enfants qui ne voient que l’éclat des fleurs, et qui les brisent sans se douter de leur parfum. J’ai été indigne de mon bonheur, de ton dévouement, de ton sacrifice, et me voilà à tes pieds, rougissant de moi, car tu méritais des hommages, des prières, de longues aspirations, et j’ai profané l’amour pur que je te devais avant de te posséder : mais, va, je réparerai mon crime ; je t’aimerai