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Cela ne l’empêchait pas d’être admirablement belle avec sa figure animée et son attitude impérieuse.

Les Anglaises que je vois ici montent bien à cheval ; mais presque toujours elles sont mal arrangées et manquent de grâce. Medora, qui n’est qu’à moitié Anglaise, est admirablement souple et bien posée. Son vêtement de cheval dessinait sa belle taille, et elle maniait sa monture ardente et magnifique avec une maestria véritable. Le cousin est un Anglais blond vif, avec beaucoup de barbe et une riche chevelure séparée en deux masses, rigidement égale, par une raie qui va du milieu du front à la nuque. Il est d’une incontestable et splendide beauté, comme lignes et comme ton ; mais je ne sais comment il se fait que, pour nos yeux français, la plupart des Anglais, quelque beaux qu’ils puissent être, ont toujours quelque chose de singulier qui tourne au comique ; je ne sais quelle gaucherie type dans la physionomie ou dans l’habillement, qui ne s’efface pas, même après beaucoup d’années passées sur te continent.

Derrière ce beau couple, au galop trottaient, avec autant d’agilité que de disgrâce, deux laquais de pure race anglaise. Tout cela passa près de nous comme la foudre, sans que la belle Medora daignât tourner la tête de notre côté, bien que Buffalo, perché sur le siège et aboyant de tous ses poumons, rendît notre véhicule assez reconnaissable.

Deux heures plus tard, nous étions tous à table dans la triste et immense salle du palais ***. Lord B*** buvait de l’eau ; lady Harriet m’accablait de tendres reproches sur ma fuite à Frascati ; le cousin mangeait et buvait comme quatre ; Medora, richement parée, et belle comme elle sait que je ne l’aime pas, m’avait à peine honoré d’un froid bonjour et parlait anglais à sir Richard B*** avec autant d’affectation que de volubilité. Je n’entends pas l’anglais et je n’en aime pas la musique. Medora s’en est maintes fois aperçue ; je