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bien nouveau ; elles n’ont que le mérite d’une sincérité absolue et d’une certaine indépendance d’esprit. Mais nous devons nous abstenir de toute réflexion préliminaire sur son travail : ce serait le déflorer. Nous nous bornerons à quelques détails sur l’auteur lui-même, tel que nous le connaissions avant qu’il se révélât, par son propre récit, d’une manière complète.

J.V. (soit Jean Valreg, puisqu’il a pris ce nom qui conserve les initiales du sien) est le fils d’un de nos plus anciens amis, mort, il y a une douzaine d’années, au fond de notre province. Valreg père était avocat. C’était un honnête homme et un homme aimable. Son instruction était sérieuse et sa conscience délicate ; mais, comme beaucoup de nos concitoyens du Berry, il manquait d’activité. Il laissa, pour toute fortune, à ses deux enfants, vingt mille francs à partager.

En province, c’est de quoi vivre sans rien faire. Partout, c’est de quoi acquérir l’éducation nécessaire à une profession libérale, ou fonder un petit commerce. Les amis de M. Valreg n’avaient donc pas à se préoccuper du sort de ses enfants, qui, d’ailleurs, ne restaient pas sans protection. Leur mère était morte jeune ; mais ils avaient des oncles et des tantes, honnêtes gens aussi, et pleins de sollicitude pour eux.

Pour ma part, je les avais entièrement perdus de vue depuis longtemps, lorsqu’un matin on m’annonça monsieur Jean Valreg.

Je vis entrer un garçon d’une vingtaine d’années, dont la taille et la figure n’avaient, au premier abord, rien de remarquable. Il était timide, mais plutôt réservé que gauche, et, voulant le mettre à l’aise, j’y parvins très-vite en m’abstenant de l’examiner et en me bornant à le questionner.

— Je me souviens de vous avoir vu souvent quand vous