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terre sont encore si peu ou si mal observées, jugez des secrets que renferment les flancs du globe ! C’est là ce qui me faisait vous dire tantôt que tout homme, si petit qu’il fût, pouvait découvrir des choses immenses ; mais revenons à nos ours, ou plutôt dépêchons-nous de déjeuner pour aller les trouver. Je ne connais aux Suédois qu’un défaut, cher ami, c’est de manger trop souvent et trop longtemps. Je comprendrais cela tout au plus quand ils ont des journées de vingt heures ; mais, quand je vois le petit arc de cercle que le soleil doit faire maintenant pour se replonger sous l’horizon, je me demande à quelle heure vous espérez chasser.

— Patience, cher Christian ! répondit le major en riant ; la chasse à l’ours n’est pas longue. C’est un coup de main réussi ou manqué, soit qu’on loge deux balles dans la tête de l’ennemi, soit que, d’un revers de patte, il vous désarme et vous assomme. Voilà le danneman qui nous annonce que le déjeuner est prêt ; marchons.

L’ambigu apporté par les officiers était très-confortable ; mais Christian vit bien que les jeunes filles et le danneman lui-même regardaient ce bon repas avec une sorte de tristesse humiliée, et qu’après s’être fait une fête d’offrir leurs mets rustiques, ils osaient