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s’affermit. Sa physionomie prit une expression d’enthousiasme et d’énergie. Elle avait ôté de dessus ses vêtements de paysanne la pauvre robe grise, ce haillon précieux avec lequel elle ne s’endormait jamais, et ses cheveux, blancs comme la neige, étaient rigidement relevés par des cordons de laine rouge qui lui donnaient je ne sais quel air de sibylle antique.

Elle s’approcha du ministre, et, sans attendre qu’on l’interrogeât, elle lui dit :

— Père et ami des affligés, tu connais Karine Bœtsoï ; tu sais que son âme n’est ni coupable ni trompeuse. Elle te demande pourquoi sonne le beffroi du château neuf ; ce que tu lui diras, elle le croira.

— Le beffroi sonne la mort, répondit le ministre ; tes oreilles ne t’ont pas trompée. Depuis longtemps, Karine, je sais qu’un secret te pèse. Tu peux parler maintenant, et peut-être tu peux guérir : le baron Olaüs n’est plus !

— Je le savais, dit-elle : le grand iarl m’est apparu cette nuit. Il m’a dit : « Je m’en vais pour toujours… » et j’ai senti mon âme renaître. À présent, je parlerai, parce que l’enfant du lac doit revenir. Je l’ai vu aussi en songe !

— Ne nous parle pas de tes songes, Karine, re-