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demeurais, et qui m’ont traité comme un membre de leur famille, ont répondu de ma bonne conduite et gardé, vis-à-vis du public, le petit secret de ma double individualité. Vous voyez donc bien, monsieur Goefle, que tout est pour le mieux dans ma situation présente, et que je peux conserver ma belle humeur, puisque j’ai la liberté, un gagne-pain assez lucratif, la passion de la science, et le monde ouvert devant mes pas agiles !

— Mais votre bourse a fait naufrage sur le lac Wettern…

— Oh ! les lacs, voyez-vous, monsieur Goefle, ils sont peuplés de bons génies avec lesquels je suis certainement en relation à mon insu. Ne suis-je pas Christian del Lago ? Ou le trolle de Wettern me rendra ma bourse au moment où je m’y attendrai le moins, ou il en fera profiter quelque pauvre pêcheur qui s’en trouvera bien, et de toutes façons le résultat sera excellent.

— Mais… pourtant… avez-vous quelque argent en poche, mon garçon ?

— Absolument rien, monsieur Goefle, répondit en riant le jeune homme. J’ai eu tout juste de quoi arriver ici, en me serrant un peu le ventre pour laisser manger à discrétion mon valet et mon âne ; mais, ce soir, j’aurai trente rigsdalers pour ma comédie.