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» Il me conduisit dans une grange où je l’aidai à mettre son matériel sur pied. Je reconnus là, mêlés à d’ignobles marionnettes de rencontre et couverts de haillons et de meurtrissures, les meilleurs sujets de ma troupe. Puffo me joua une scène pour me donner un échantillon de son talent. Il maniait ces burattini avec dextérité et ne manquait pas d’une certaine verve grossière ; mais j’avais le cœur vraiment percé de douleur en voyant mes acteurs tombés en de telles mains et réduits à jouer de tels rôles. En y réfléchissant cependant, je vis que la Providence nous réunissait, eux et moi, pour notre salut commun. Sur-le-champ j’organisai à moi seul une représentation dans le village, et je gagnai un ducat, à la grande stupéfaction de Puffo, lequel, à partir de ce moment, m’abandonna le théâtre, les acteurs et le soin de sa propre destinée.

» N’avais-je pas été vraiment protégé par le ciel ? n’avais-je pas retrouvé le seul moyen de continuer mes voyages avec aisance, sans rien devoir à personne et sans livrer mon nom et ma figure aux caprices du public ? En peu de jours, toutes les marionnettes furent repassées au ciseau, nettoyées, repeintes, habillées de neuf, et bien rangées dans une boîte commode et portative. Le théâtre fut également restauré et agrandi pour deux operanti. Je pris Puffo à mon