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quelque chose, je chercherais de l’ouvrage, et que, si, au bout du délai, je pouvais solder ma dépense, je ne serais pas forcé de laisser mon âne en payement. Le conseil était sage ; je l’acceptai, résolu à bêcher la terre plutôt que de ne pas dégager ma caution, ce pauvre Jean, utile encore à son maître.

» Mon hôte était cordonnier. Pour lui prouver que je n’étais pas un paresseux, je lui demandai en quoi, ne sachant pas son état, je pourrais lui être utile.

» — Je vois, me répondit-il, que vous êtes un bon sujet, et votre figure me donne confiance en vous. C’est demain foire dans un village à deux lieues d’ici. Je suis empêché de m’y rendre ; allez-y à ma place avec un chargement de ma marchandise sur votre âne, et vendez-moi le plus de souliers que vous pourrez. Vous aurez une part de dix pour cent dans le profit.

» Le lendemain, j’étais à mon poste, vendant des souliers comme si je n’eusse fait autre chose de ma vie. Je n’avais pourtant aucune notion des roueries particulières au petit ou au grand commerce ; mais j’imaginai de faire des compliments à toutes les femmes sur la petitesse de leurs pieds, et j’amusai tant le monde par mes hyperboles et mon babil, que toute ma cargaison fut écoulée en quelques heures. Le soir, je revins gaiement chez mon patron, qui,