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Je ne vous raconterai pas mes travaux, mes courses, mes aventures. C’est un voyage que j’écrirai dès que j’en aurai le loisir, et la perte récente de mon journal ne me sera pas un obstacle insurmontable, grâce à la mémoire peu commune dont je suis doué. Dans ces excursions solitaires, je recouvrai ma belle santé, mon insouciance de caractère, ma confiance à l’avenir, ma gaieté intérieure, toutes choses que la vie de Paris avait fort détériorées en moi. Je me sentis réconcilié avec le souvenir de mes Goffredi ; c’est vous dire que je me sentis heureux.

» J’avais assez travaillé la botanique et la minéralogie pour remplir mes promesses relatives à ces deux spécialités ; mais, ne donnant rien aux vanités du monde, j’avais le loisir de vivre pour mon compte en observateur, et peut-être aussi un peu en artiste et en poète, c’est-à-dire en homme qui sent les beautés de la nature dans son divin ensemble. De chaque station importante, j’expédiais à Paris mes rapports et mes échantillons même, avec des lettres assez détaillées adressées à M. Daubenton, sachant que les impressions romanesques d’un jeune homme ne lui déplairaient pas.

» Au bout de neuf ou dix mois, j’étais dans les Karpathes avec mon âne, qui me rendait véritablement de grands services, et qui était si fidèle et si