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ville. Je fus bien frappé de la simplicité et de la gaieté avec lesquelles il fit ainsi l’emploi de son argent, en homme habitué à regarder cela comme un devoir indispensable, et dont il n’avait que faire de se cacher, tant la chose était naturelle. Je me reprochai d’avoir longtemps oublié que tout ce que disait et faisait là M. Comus, c’était l’enseignement et la pratique de mes chers Goffredi. C’est ainsi, monsieur Goefle, qu’un escamoteur ambulant prêcha et acheva de convertir un improvisateur de grands chemins.

» Nous arrivâmes à Paris : notre voyage avait duré trois mois, et je me le rappelle comme une des phases les plus agréables de ma vie. Je n’avais pas perdu mon temps en route, j’avais étudié avec soin la nature et la société dans ce qu’elles ont d’accessible à l’homme qui, sans être spécial, n’est pas plus obtus qu’un autre. J’avais pris des notes ; je m’imaginais que, dans la ville des lettres et des arts, rien ne me serait plus facile que de vivre de ma plume, ayant quelque chose à dire et me sentant la force de le dire.

» Nous entrâmes dans la grande ville par un temps d’automne sombre et triste. J’eus de la peine à me figurer qu’on pût s’habituer à ce climat, et Guido, dès les premiers pas, s’attrista et se démoralisa visi-