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de la défunte baronne, morte dans cette chambre il y a plus de vingt ans.

» Je m’étais moqué, une heure auparavant, des apparitions, pour rassurer mon petit laquais ; mais vous savez comment se forment les rêves : souvent, d’une parole dite ou entendue, sans grande attention, dans la journée et oubliée l’instant d’après, ils éclosent mystérieusement en nous à notre insu, et se font porter ainsi jusqu’à la nuit, où, dès que nous avons les yeux fermés et la raison endormie, ils se dressent dans notre imagination et devant nos yeux abusés en images fantastiques, décuplés d’importance et quelquefois d’horreur.

» Il faut croire que l’hallucination, c’est-à-dire le rêve sans sommeil, suit exactement les même lois. J’avais fini de souper et je venais d’allumer ma pipe, lorsqu’un cri aigu et plaintif comme celui du vent pénétrant par une porte subitement ouverte passa dans toute la chambre, en même temps que l’air ébranlé et refroidi fit vaciller la flamme des bougies posées sur ma table. Comme j’avais en ce moment les yeux tournés vers la porte du vestibule et que je la voyais bien fermée et immobile, je crus que Nils s’était éveillé et, qu’il venait d’ouvrir la porte opposée, celle de la chambre de garde.

» — Ah ! te voilà encore ! m’écriai-je en me