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tail au milieu desquelles s’opéra mon évasion du territoire de Naples. J’avais réussi à échanger mes vêtements en lambeaux contre des guenilles moins compromettantes. Je trouvais difficilement à manger ; les hommes du peuple, sachant que l’on poursuivait le vil assassin d’un noble personnage, se méfiaient de tout inconnu sans ressources, et, n’eussent été les femmes, qui en tout pays sont plus courageuses et plus humaines que nous, je serais mort de faim et de fièvre. Ma blessure me forçait à m’arrêter souvent dans les recoins les plus déserts que je pouvais trouver, et, là, privé des soins les plus élémentaires, j’envisageai plus d’une fois l’éventualité d’y rester, faute de pouvoir me relever et reprendre ma course. Eh bien, croiriez-vous, monsieur Goefle, que, dans cette situation désespérée, j’éprouvais par moments des bouffées de joie, comme si, en dépit de tout, je savourais l’aurore de ma liberté reconquise ? L’air, le mouvement, l’absence de contrainte, la vue des campagnes dont je pouvais maintenant espérer de franchir les horizons sans limites, tout, jusqu’à la rudesse de ma couche sur le rocher, me rappelait les projets et les aspirations du temps où j’avais réellement vécu.

» Enfin j’approchais sans accident de la frontière des États du pape, et, comme je n’avais pas suivi la