Page:Sand - L Homme de neige vol 1.djvu/251

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Ah ! ah ! mon garçon, dit M. Goefle en souriant, c’est ainsi que vous traitez les avocats, vous ?… Tenez, donnez-moi donc une poignée de main, ajouta-t-il en regardant Cristiano avec des yeux humides d’attendrissement et de sympathie.

Cristiano serra les mains du bon Goefle, et les porta à ses lèvres à la manière italienne.

— J’accepte votre bonté pour moi, dit-il ; mais je n’accepterais pas d’éloges sur ma conduite. Elle était si naturelle, voyez-vous, que toute préoccupation personnelle dans ma situation eût été infâme. Ne vous ai-je donc pas dit combien j’avais été aimé, choyé, gâté par ces deux êtres dont je me sentais véritablement le fils, autant par les entrailles que par le cœur ? Ah ! j’avais été heureux, bien heureux, monsieur Goefle ! et je n’aurai jamais le droit, quelque désastre qui puisse m’arriver, de me plaindre de la Providence. Je n’avais pas mérité tout ce bonheur-là avant de naître. Ne devais-je pas tâcher de le mériter après avoir un peu vécu ?

— Et que devint la pauvre Sofia ? dit M. Goefle après avoir rêvé quelques instants.

— Hélas ! je me promettais de vous raconter mon histoire aussi gaiement que possible, et voilà que je n’ai pas su effleurer le côté douloureux de mes souvenirs ! Je vous en demande pardon, monsieur Goe-