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» Ainsi, lui disais-je, j’aime le beau soleil et la sombre nuit, notre austère Pérugin et le fougueux Michel-Ange, les puissantes substructions romaines et les délicates découpures sarrasines. J’aime notre paisible lac de Trasimène et la foudroyante cataracte de Terni. J’aime vos chers étrusques et tous vos sublimes anciens ; mais j’aime aussi les cathédrales gréco-arabes, et, tout autant que la fontaine monumentale de Trevi, le filet d’eau qui court entre deux roches au fond de quelque solitude champêtre, Chaque chose nouvelle me paraît digne d’intérêt et d’attention, et toute chose m’est chère qui s’empare de mon cœur ou de ma pensée à un moment donné. Ainsi porté à me livrer à tout ce qui est beau et sublime, ou seulement agréable et charmant, je me sens effrayé des exigences d’un culte exclusif pour certaines formes du beau.

» Si vous trouvez cependant, lui disais-je encore, que je suis sur une mauvaise pente, et que ce besoin de développement dans tous les sens soit un dérèglement dangereux, je tâcherai de tout réprimer et de m’absorber dans l’étude que vous me choisirez. Avant tout, je veux être ce que vous souhaitez que je sois ; mais vous, mon père, avant de me couper les ailes, examinez un peu s’il n’y a rien dans tout ce vain plumage qui mérite d’être conservé.