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trouve rien, je pense à mes ouvrages, et j’attends sans souffrir. À une bonne table, je mange de tout, et tant qu’il y en a, sans être jamais incommodé. Je ne sens ni chaud ni froid ; ma tête brûle toujours, mais d’un feu sublime qui n’use pas la machine, et qui tout au contraire la soutient et la renouvelle. Je ne connais pas la haine ou l’envie ; je sais très-bien que personne n’en sait plus que moi, et, quant à ceux qui me jalousent (le nombre en est grand), je les écrase comme des vers de terre, et ils ne se relèvent jamais de ma critique. Bref, je suis de fer, d’or et de diamant, et je défie les entrailles du globe de receler une matière plus dure et plus précieuse que celle dont je suis fait.

À cette déclaration si nette et si franche, Cristiano ne put se défendre d’un fou rire qui ne déconcerta et ne fâcha en rien le chevalier de l’Étoile polaire. Tout au contraire, il prit cette hilarité pour un joyeux hommage rendu à sa supériorité universelle, et Cristiano vit bien qu’il avait affaire à une sorte d’exaltation très-singulière, et qu’il eût pu définir ainsi : la folie par excès de positivisme. Il eût été bien inutile de l’interroger sur les personnes qui intéressaient Cristiano. M. Stangstadius daigna seulement dire que le baron de Waldemora avait quelques velléités de science, mais qu’au fond c’était un crétin. Quant