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MAXWELL.

Oui, et vous continuez !…

HÉLÈNE.

Mais… c’était mon plaisir et ma joie, de lui céder ; pourquoi ne serait-ce plus de même ? quand je le voyais content, j’étais heureuse, quand il se blessait en jouant, c’est moi qui pleurais ! j’ai eu tant de chagrin quand il nous a quittés pour habiter la ville ! il riait, lui, il était content de changer, de s’émanciper… moi, je dévorais mes larmes. Depuis ce moment-là, j’ai senti que je l’aimais autrement, moins bien peut-être ! je lui en ai voulu de m’avoir été si cher et de ne pas s’en être aperçu, j’ai reconnu que je ne pouvais pas vivre heureuse sans lui et j’ai été bien en colère de ce qu’il pouvait vivre sans moi. Voilà pourquoi depuis trois ans je vous dis que je ne l’aime pas… mais je crois bien que je me suis menti à moi-même, et à présent, qu’il m’aime bien ou mal, je ne veux pas qu’il parte, car avec lui s’en ira tout mon courage, et, quand je n’aurai plus ma grand’mère, mon existence sans lui n’aura plus de raison d’être !

JEANNE, à Maxwell.

Je savais tout cela, moi ! il faut être femme pour comprendre ce qu’on ne vous dit pas et vous ne vouliez pas me croire.

HÉLÈNE, à Maxwell.

Vous voilà mécontent, attristé ! Ah ! mon ami, vous avez promis de l’aimer si je l’aime !

MAXWELL.

Je suis très-malheureux, Hélène ! oui, bien malheureux ! vous l’aimez, je le sens, je le vois, et vous ne pouvez pas l’épouser, à présent du moins et dans ces conditions-là !

HÉLÈNE.

Qui donc s’y opposerait ?