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vraient les anciennes, et me trouva évanouie sous des débris qui allaient m’ensevelir. La pitié, le zèle que donne la foi à ceux mêmes qui manquent d’humanité, lui firent trouver la force cruelle de me sauver ; il m’emporta sur son cheval au travers des plaines, des bois et des vallées. Ce prêtre s’appelait Magnus. Par lui je fus arrachée ä la mort et rendue à la douleur.

» Depuis que je suis rentrée dans la société, mon existence est plus misérable qu’auparavant. D’abord il me sembla que Dieu parlait à mon cœur par les mille voix de la nature, et qu’il était temps encore de partager la vie avec un être semblable à moi. J’oubliais, hélas ! que j’étais une exception maudite et que cet être n’existait pas. Éclairée sur les résultats inaccessibles pour moi de l’amour naturel et complet, j’espérai me sauver en ne subissant que la moitié de sa puissance, en réalisant les chimères du platonisme ; mais sachant bien que je trouverais difficilement