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le besoin de vivre ; et maintenant tu t’en effraies, et tu crois qu’il te serait possible de calmer tes désirs par la jouissance. Insensé puéril ! il n’est plus temps d’y songer. Tu aurais pu trouver le bonheur dans la liberté, il y a quelques années ; ta raison aurait pu s’éclairer, ton ame s’endurcir contre de vains remords. Mais aujourd’hui, l’horreur, le dégoût et l’effroi te poursuivraient partout. Tu ne pourrais pas connaître l’amour, tu le prendrais toujours pour le crime, et l’habitude de flétrir du nom de péché les joies légitimes te rendrait criminel et vicieux, aux yeux de ta conscience, dans les bras de la femme la plus pure. Résigne-toi, pauvre moine, abaisse ton orgueil. Tu t’es cru assez grand pour cette terrible vertu du cloître ; tu t’es trompé, te dis-je. Mais qu’importe ? Tu arrives au terme de tes maux ; applique-toi à ne pas en perdre le fruit. Tu n’as pas été assez grand pour que Dieu te pardonne le désespoir ; tu n’es pas Sténio.