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avait résisté long-temps aux outrages de la fatigue et de la maladie, dernière beauté qui devait survivre à la prochaine dissolution du cadavre, elle flottait soyeuse et vivante sur ce front glacé, comme aux jours où le poëte enfant courait au soleil du matin sur les sentiers fleuris de la montagne.

Lélia se rappela les jours où elle l’avait aimé le plus. C’était lorsqu’il était plutôt poëte qu’amant. Dans ces premiers temps de leur affection, la passion de Sténio avait quelque chose de romanesque et d’angélique. Il ne songeait alors qu’à chanter Lélia, à prier Dieu pour elle, à rêver d’elle, ou à la contempler dans une extase muette. Plus tard, son œil s’était animé d’un feu plus viril, sa lèvre plus avide avait cherché et demandé le baiser, sa poésie avait exprimé des transports plus sauvages ; c’est alors que l’impuissante Lélia s’était sentie effrayée, fatiguée et presque dégoûtée de cet amour qu’elle ne partageait pas. Maintenant elle retrouvait Sténio calme et recueilli