Page:Sand - Lélia, édition Dupuy-Tenré, 1833, tome 2.djvu/305

Cette page a été validée par deux contributeurs.

se divinise : mais se voilerait-elle ainsi, si son corps était plus beau que celui des femmes qu’on achète ? Son ame se déroberait-elle aux épanchemens de l’affection, si son ame était plus vaste et plus grande que la nôtre ?

Ô femme ! tu n’es que mensonge ! homme ! tu n’es que vanité ! À de si insolentes prétentions Dieu devait bien le châtiment de ces déceptions misérables ! Lélia, c’est ton sourire qui m’a égaré ! Don Juan, c’est ton exemple qui m’a perdu !…

Sténio s’assit rêveur, et se relevant bientôt :

— Oui, c’est toi, don Juan, qui m’as perdu sans retour ! s’écria-t-il avec véhémence ; c’est ma fervente adoration pour toi qui m’a jeté dans un abîme sans fond. En marchant sur tes traces, j’espérais m’élever au-dessus des autres hommes ; le jour où je t’ai dit : Sois mon étoile et mon Dieu, le jour où j’ai blasphémé le maître du monde pour rapporter sur l’autel de ton génie mes prières et mon encens,