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se laissait emmener avec l’apathie d’un prisonnier de guerre, et son indifférence pour l’avenir semblait lui rendre la jouissance du présent. Il regardait souvent avec admiration les beaux sites de ce pays enchanté, et priait Trenmor de faire arrêter les chevaux pour qu’il pût gravir une montagne, ou s’asseoir au bord d’un fleuve. Alors il retrouvait des lueurs d’enthousiasme, des élans de poésie, pour comprendre la nature et pour la célébrer.

Mais, malgré ces instans de réveil et de renaissance, Trenmor put observer dans son jeune ami les irréparables ravages de la débauche. Autrefois, sa pensée active et vigilante s’emparait de toutes choses et donnait la couleur, la forme et la vie à tous les objets extérieurs ; maintenant, Sténio végétait, à l’ordinaire, dans un voluptueux et funeste abrutissement. Il semblait dédaigner de faire emploi de son intelligence ; mais, en réalité, il n’était plus le maître de la gouverner. Sou-