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gembre qui ronge les entrailles, la canelle qui précipite la circulation du sang. Allons, page effronté, prépare-moi ce mélange détestable pour qu’il me brûle la langue et m’exalte le cerveau. J’en boirai, dût-on me tenir de force pour me le faire avaler, car je veux devenir fou et me sentir jeune, ne fût-ce qu’une heure, et mourir après. Vous verrez, Trenmor, comme je suis beau dans l’ivresse, comme la divine poésie descend en moi, comme le feu du ciel embrase ma pensée alors que le feu de la fièvre circule dans mes veines. Allons, le vase fumant est sur la table ; à vous tous, débiles buveurs, pâles débauchés, je porte ce défi ! Vous m’avez raillé, voyons maintenant lequel de vous osera me tenir tête ?

— Qui donc nous délivrera de ce fanfaron sans moustache ? dit Antonio à Zamarelli. N’avons-nous point assez supporté l’insolence de ses manières ?

— Laissez-le faire, répondit Zamarelli,