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Hélas ! il est donc bien vrai ? J’étais donc un puéril insensé, un misérable fou quand je croyais aux promesses du ciel, quand je m’imaginais que l’homme était aussi bien organisé que les herbes des champs, que son existence pouvait se doubler, se compléter, se confondre avec une autre existence et s’absorber dans les étreintes d’un transport sacré ! Je le croyais ! Je savais que ces mystères s’accomplissaient à la chaleur du soleil, sous l’œil de Dieu, dans le calice des fleurs ! et je me disais : — L’amour de l’homme pur pour la femme pure est aussi suave, aussi légitime, aussi ardent que ceux-là. — Je ne me souvenais plus des lois, des usages et des mœurs qui dénaturent l’emploi des facultés humaines et détruisent l’ordre de l’univers. Insensible aux ambitions qui tourmentent les hommes, je me réfugiais dans l’amour, sans songer que la société avait aussi passé par là, et qu’il ne restait pas d’autre ressource aux ames ardentes que de s’user et de s’éteindre par le mépris