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vent éprouvé, est une puissance dangereuse à celui qui s’en sert, une arme qui blesse la main qui la soulève, un phare éclatant, mais trompeur, qui nous égare d’abîme en abîme. J’ai souvent maudit cette source d’amertume, j’ai souvent demandé à Dieu de me rendre semblable aux animaux des bois. Mais, dans l’égarement de ma souffrance, je formais un souhait que je n’eusse pas voulu voir réaliser. J’eusse consenti à revêtir la robe des panthères et à m’enfoncer dans les solitudes ignorées de l’homme, à posséder les ailes des mouettes et à traverser les mers, portée par les tempêtes, mais à condition que la pensée humaine vivrait en moi pour contempler les beautés du désert, la splendeur des nuées et l’immensité des flots. Je ne comprenais pas les avantages de la vigueur musculaire, de l’agilité physique, du développement extraordinaire et magnifique de certains sens, comme la vue chez les oiseaux, comme celle