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heur que j’ai rêvé jadis, dont je n’ai saisi que l’ombre ! Mais je sens bien que je ne puis me sauver que par la résignation, que de nouvelles erreurs, de nouvelles tentatives aigriraient mon mal et le rendraient incurable.

Posséder les facultés de l’amour dans leur double puissance, être capable de ressentir vivement les joies de l’ame et celles des sens, savez-vous, Sténio, que cela n’est pas donné à beaucoup d’entre nous ? Si vous êtes doué de cette richesse d’organisation, ce n’est pas une raison de vous indigner si vous ne rencontrez point votre égal en ce monde. Je déclare humblement que je ne le suis point. Les maux attachés à ma triste existence sont là pour m’affranchir du reproche d’ironie et de mépris.

Peut-être ne devrais-je pas me plaindre de mon partage. Beaucoup m’ont dit que Dieu m’avait traitée magnifiquement en me donnant l’intelligence. Mais la pensée, je l’ai sou-