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sensations s’émoussent à force de se reproduire.

— Le calme ! dit Trenmor en levant vers le ciel son regard sublime ; le calme c’est le plus grand bienfait de la Divinité, c’est l’avenir où tend sans cesse l’ame immortelle, c’est la béatitude ! le calme, c’est Dieu ! Eh bien ! c’est au bagne que je l’ai trouvé. Le secret de la destinée humaine, sans le bagne je ne l’aurais jamais compris, je ne l’aurais jamais goûté, moi joueur, moi homme sans croyance et sans but, fatigué d’une vie dont je cherchais en vain l’issue, tourmenté d’une liberté dont je ne savais que faire, ne prenant pas le temps d’y rêver, tant j’étais pressé de pousser le temps et d’abréger l’ennui d’exister ! J’avais besoin d’être débarrassé pour quelque temps de ma volonté, et de tomber sous l’empire de quelque volonté haineuse et brutale, qui m’enseignât le prix de la mienne. Cette surabondance d’énergie, qui s’allait cramponner aux dangers et aux fatigues vulgaires de la vie lé-